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le 12-09-2012 : #bruxelles

Comment optimiser l’acquisition d’un immeuble ?

Comment optimiser l’acquisition d’un immeuble ?

Faut-il acheter un immeuble en personne physique ou par le biais de sa société ? Faut-il l’acquérir en pleine propriété ou démembrer en usufruit et nue-propriété ? Il n’est effectivement pas toujours aisé de déterminer quelle solution adopter. Si une solution s’avère être plus avantageuse sur un plan, elle peut l’être moins sur un autre et vice versa. Tout est donc question du cas d’espèce et devra être attentivement examiné.

 

L'achat de l'immeuble en personne physique

 

Les intérêts de l'emprunt hypothécaire contracté pour acquérir un bien immeuble sont déductibles à l'impôt des personnes physiques.

 

Si l’immeuble acquis est votre seule propriété immobilière et que vous comptez y installer votre domicile, vous pourrez bénéficier de la déduction pour habitation propre et unique. Ce régime permet au contribuable de déduire de l'ensemble de ses revenus, les intérêts d'emprunt, les sommes affectées à l’amortissement de l'emprunt hypothécaire, ainsi queles cotisations d’une assurance complémentaire contre la vieillesse et le décès prématuré qui sert exclusivement à la reconstitution ou à la garantie d’un tel emprunt hypothécaire.

 

En cas de revente de l’immeuble endéans les 5 ans de son acquisition, la plus-value réalisée sera imposable à  titre de revenus divers, au taux de 16,5%. Toute plus-value réalisée plus de cinq ans après l'acquisition du bien n'est pas imposable.

 

L'achat de l'immeuble en société

 

Si votre société acquiert l'immeuble en pleine propriété et qu'elle occupe l'immeuble, elle déduira les frais d'acquisition et d'entretien et amortira l'immeuble, ainsi que les frais d'acquisition.Les frais exposés (frais d’acquisition, d'entretien, etc.) ne seront déductibles par la société à titre de frais professionnels que si ceux-ci se rattachent à l'objet essentiel de la société et sont exposés en vue « d'acquérir ou de conserver des revenus professionnels ». A cet égard, les cours et tribunaux ne se contentent pas de regarder quel est l'objet social de la société dans ses statuts, mais examine, en fait, quelle est l'activité essentielle de la société.

 

La société pourrait également mettre l'immeuble à disposition de son dirigeant, auquel cas un avantage de toute nature sera calculé dans le chef du dirigeant. Si ce dernier paye un loyer à la société, le montant de l'avantage de toute nature sera réduit en conséquence.

 

La principale problématique de l'acquisition d'un immeuble par le biais d'une société se pose lors de la revente de l'immeuble, ou de manière plus générale quand il y a lieu de sortir le bien de la société. En effet, lors de la revente, la société sera imposée sur la plus-value réalisée, et ce au taux d'imposition ordinaire applicable à l'impôt des sociétés (33,9%). Il existe cependant des solutions de remploi prévues par le code et qui permet d’étaler la taxation selon un mécanisme précis.

 

La solution du démembrement usufruit / nue-propriété

 

La solution à laquelle il était le plus souvent recouru pour optimiser l’acquisition d’un immeuble consistait pour un contribuable à acheter la nue-propriété d’un immeuble, et à en faire acheter l’usufruit (pour une durée de 15 à 20 ans en général) par sa société professionnelle. L’usufruit est un droit réel, temporaire et au maximum viager, qui permet à son titulaire de se servir d’une chose appartenant à autrui et d’en percevoir les fruits si elle est frugifère, à charge d’en conserver la substance et d’en jouir en bon père de famille.

 

De cette manière, la société amortit l’usufruit de l’immeuble bâti et déduit les frais financiers liés à l’achat (y inclus l’acte notarié) ainsi que les frais d’entretien. Du côté de l’administrateur, l’utilisation personnelle du bien sera imposable dans son chef à l’impôt des personnes physiques.

 

Ce mécanisme permet au gérant (nu-propriétaire) de devenir le plein-propriétaire à l’expiration de l’usufruit, sans être redevable de droits d’enregistrement supplémentaires – lors de l’acquisition les droits  d’enregistrement doivent être partagés entre le nu-propriétaire et l’usufruitier selon leurs valorisations respectives, déterminant le pourcentage des frais à supporter par chacun –. En d’autres termes, aucun droit d’enregistrement supplémentaire ne sera dû sur la valeur qu’aura le bien au terme de l’usufruit.

 

Cette solution permet également d’éviter une plus-value taxable à l’impôt des sociétés lors de la revente ultérieure du bien.

 

L'avantage est que la plupart des frais ont été supporté par la société, et qu'à l’extinction du droit d'usufruit, le dirigeant personne physique devient plein propriétaire de l'immeuble, sans autres frais ni indemnités, sur base du droit civil. Une question éventuelle d’avantage de toute nature pourrait néanmoins se poser dans certains cas.

 

Il existe toutefois dans le droit belge, une disposition dite « anti-abus » qui vient d'être modifiée. Selon cette disposition (ancienne version), la qualification juridique donnée à un acte par les parties n’était pas opposable à l’administration fiscale lorsque cette dernière constatait que cette qualification avait pour but d’éviter l’impôt, sauf pour le contribuable à prouver que cette qualification répondait à des besoins légitimes de caractère financier ou économique.La Cour de cassation avait fortement limité la marge de manœuvre de l'administration, en précisant que la requalification n'était possible que si les effets juridiques (non fiscaux) de l'opération nouvellement qualifiée étaient similaires à ceux de l'opération initialement qualifiée.

 

Cette disposition anti-abus a été renforcée puisque les opérations (ou ensemble d'opérations) constituant un « abus fiscal » ne sont plus opposables à l'administration, quand bien même les conséquences juridiques non fiscales seraient différentes.Il appartient désormais au contribuable de prouver que le choix de cet acte juridique ou de cet ensemble d'actes juridiques se justifie par d'autres motifs que la volonté d'éviter l’impôt. Lorsque le contribuable ne fournit pas la preuve contraire, la base imposable et le calcul de l'impôt sont rétablis en manière telle que l'opération est soumise à un prélèvement conforme à l'objectif de la loi, comme si l'abus n'avait pas eu lieu.

 

Avec cette nouvelle version de la disposition anti-abus, les choses sont devenues beaucoup plus délicates encore puisque les constructions usufruit/nue-propriété constituent la principale cible de la nouvelle mesure anti-abus (surtout les opérations dites de « turbo-usufruit » où le dirigeant acquiert la nue-propriété d'un terrain et où la société qui en acquiert l'usufruit, y fait ériger un bâtiment).

 

L’emphytéose et la superficie

 

Lorsque vous êtes propriétaire d’un terrain en personne physique et que l’immeuble est à bâtir, le droits réels d’emphytéose et de superficie sont intéressants.  L’emphytéose permet à son titulaire d’avoir la jouissance d’un immeuble appartenant à autrui, à charge de payer à celui-ci une redevance annuelle. La superficie, quant à elle, consiste pour le superficiaire, à exercer un droit de propriété sur des bâtiments à construire par le superficiaire sur un fonds appartenant à autrui, le tréfoncier. 

 

Le propriétaire du fonds n’acquiert la propriété des constructions érigées ou plantations faites par l’emphytéote ou le superficiaire qu’à l’expiration de leur droit (minimum 27 ans et maximum 99 ans pour l’emphytéose, et pas de minimum et maximum 50 ans et pour la superficie), et pour autant que ces derniers n’aient pas démoli ces constructions ou arraché ces plantations. Lors de cette accession, aucune indemnité ne sera due à l’emphytéote. Le superficiaire par contre recevra une indemnité égale à la valeur des constructions ou plantations, et pourra invoquer un droit de rétention tant que cette indemnité ne lui aura pas été versée par le tréfoncier.

 

Conclusions

 

La solution à adopter dépend donc essentiellement des éléments de fait qui caractérisent votre situation (destination de l'immeuble, immeuble bâti existant ou à bâtir, intention de revendre ou non à court terme, activités de la société, etc.) et il convient d’examiner celle-ci attentivement avant de se lancer dans quelque opération immobilière qui soit.

 

Rédaction de l’article par Eric Boigelot et Aurélie Blaffart – Avocate Cabinet Praetica

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