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le 01-01-2017 : #bruxelles

On ne rigole plus : enfants et cybercriminalité, les conseils du pro

On ne rigole plus : enfants et cybercriminalité, les conseils du pro

On vous en parle, pour vous aider à en parler avec eux…

De quoi ? Avec qui ? De la cybercriminalité, avec nos jeunes, cible "privilégiée" de ce phénomène, eux qui vivent connectés 24/7.

Ce monde virtuel, source d’un grand bonheur, mais aussi d’une terrible souffrance parfois … Et dans ce cas, même avec notre meilleure volonté, on ne sait pas forcément quoi faire ou dire. On se trouve démuni, faute d’informations sur le sujet.

Alors comment les sensibiliser, et les aider si par malheur ils en sont victimes? 

Parce que l’on peut tous être concernés à un moment donné, French-Connect a délaissé sa quête de bonnes adresses le temps d’investiguer sur le sujet, en s’adressant à un spécialiste, pour partager avec vous sa connaissance du sujet, ses préconisations, et des informations concrètes pour agir au mieux. 

 

Le pire est arrivé à l'un de nos amis, sa fille s'est suicidée suite à des menaces répétées et au harcèlement qu'elle subissait depuis des mois.

Nous avons décidé de faire un carnet spécifique sur ce sujet pour que le pire ne se reproduise plus. Pour cela, nous avons rencontré Olivier Bogaert, commissaire de Police à la Cellule de cybercriminalité. Il a répondu à nos questions pour nous donner des éclaircissements, des conseils et des outils.

Elle repose en paix... toutes nos pensées...

 

 

 

1-  Bonjour Olivier Bogaert, pouvez-vous vous présenter ?

 

Bonjour, Je suis Olivier Bogaert, commissaire à la police Fédérale de Bruxelles au sein de la cellule cybercriminalité depuis 1997.

Cette cellule est attentive à l’aspect prévention: nous donnons des conseils pratiques auprès  des médias, des écoles, et des associations.

 

2- En tant que spécialiste de ces sujets, constatez-vous une augmentation de la cybercriminalité ?

 

Oui c’est un phénomène grandissant, forcément, car les enfants sont de plus en plus connectés. Les parents ont du mal à percevoir l’ampleur du phénomène car ils n’ont jamais été confrontés à ce type de problème dans leur jeunesse.

Les adolescents sont nés avec l’outil numérique qu’ils intègrent  complètement dans leur vie, mais ils n’ont pas les balises pour leur bon usage.

 

En tant que professionnel, nous expliquons aux parents quels sont les risques et situations possibles de cybercriminalité. Ils n’ont pas toujours conscience des dérives, et se retrouvent dépassés quand ils découvrent que leur enfant est victime de moqueries ou de harcèlement.

Cette violence numérique est surtout relevée chez des mineurs adolescents, entre 13 et 17 ans. On le constate plus fréquemment à cet âge, car le phénomène est amplifié par des actes d’impulsivité liés à la phase de l’adolescence.

 

L’état des lieux  en Belgique n’est pas évident à faire car les victimes ne vont pas nécessairement vers les autorités.  Cependant,  les services d’aide à l’enfance constatent un nombre significatif d’appels en rapport avec le volet de dérive numérique.

 

3 - Que peut-on faire face à un cas révélé de cyberviolence ?

 

L’enfant a les outils numériques à sa portée, il les consulte souvent seul dans sa chambre. Le problème c’est qu’il ne va pas se confier.

Il va être désemparé et éprouvera un sentiment de honte s’il avoue à ses parents qu’il s’est fait avoir. Donc, souvent il va garder le silence, et ça c’est destructeur.

 

4 - Que peut-on faire en tant que parent ?

Les parents doivent provoquer eux –mêmes la discussion pour pousser les enfants à se confier. Ils peuvent par exemple dresser des parallèles avec l’ambiance au travail, raconter que certains collègues sont victimes de moqueries. L’enfant peut donc se dire qu’il n’est pas tout seul dans cette situation. Une autre  façon d’aborder le sujet, c’est dire que l’on entend à la télé que des enfants sont victimes de moqueries sur Internet, et que si cela arrivait au leur, ils s’en chargeraient  illico.

Il faut surtout ne pas interdire les outils numériques, mais faire comprendre à l’enfant que certains comportements ne sont pas normaux.

 

5-  Si un cas est révélé, que  peut-on faire ?

Quand l’enfant parvient à en parler, c’est dire à l’enfant « je vais m’en occuper, ce n’est plus ton problème, je vais te soulager de ça » , surtout ne pas émettre de jugement vis à vis de l’enfant ou le contraindre à se défendre. Non, il est nécessaire de le décharger de ça.  Les enfants dénoncent rarement les auteurs. C’est pour cela que les parents doivent prendre en charge le problème afin que l’enfant ne soit plus en 1ère ligne des attaques.

 

La 1ère démarche est à faire auprès de la direction de l’école, afin qu’elle soit avertie, et qu’elle puisse être vigilante. Désormais, le personnel des écoles est formé, et une personne référent peut-être désignée.

La 2è démarche est à faire auprès des autorités de police en mettant en  évidence qu’il y a moqueries ou harcèlement. Vous demandez, en tant que parent ou responsable, à déposer plainte en son nom.

Les autorités ont alors le levier suffisant pour réaliser des investigations et remonter jusqu’aux auteurs.

Le magistrat en charge du dossier peut le cas échéant, si le cas devient grave, saisir le juge de la jeunesse pour prendre des mesures précises vis à vis des auteurs.

 

6 - Qu’encourent les auteurs ?

Ils peuvent encourir des sanctions sévères. Ce que l’on voit dans les arrondissements judiciaires du pays, c’est qu’on les sanctionne par des travaux d’intérêt général.

Le magistrat impose souvent des travaux dans les écoles, notamment pendant les vacances.

Si on est en face d’auteurs majeurs, je pense à des cas révélés à l’Université, le simple fait de les convoquer avec interception à la maison, de saisie de leur matériel informatique, de les passer en cellule avant audition, de les faire patienter pendant l’arrivée d’un avocat (car il y a obligation d’être entendu) : tout cela  provoque très souvent un électrochoc auprès des auteurs.

 

7- Quels conseils pouvez-vous donner aux parents ?

Il faut que les parents réagissent de façon calme et ferme. Surtout ne pas céder  à  la panique. Sinon l’enfant peut culpabiliser, surtout s’il voit ses parents en souffrir. Il faut le libérer  d’un comportement fautif. Il faut se montrer fort et disponible pour lui.

 

A l’inverse, les parents ne doivent pas minimiser les faits.  « Tu verras ce n’est pas grave » « ça va s’arranger ».  « ce sont des gamineries ».  Non, ce n’est pas une fatalité, on peut y remédier en travaillant avec l’école. 

Donc, le rôle des parents est déterminant. Ne pas montrer son désarroi, ni minimiser les actes.

 

8 – Quels sont les outils à disposition ?

 

Des numéros de téléphone à connaître :

Le 103 = Service à l’enfance

Le 112000 Focus Child

 

Des conseils sur : 

click safe

surfonstranquille = conseils sur les usages numériques

police.be 

stopcyberhate = conseils pour les parents/enfants/enseignants

 

Avec une appli à télécharger =  qui va permettre d’installer un quiz sur le téléphone portable, l’enfant ou l’ado peut se tester et comprendre s'il est en situation de harcèlement, si c’est le cas le N°103 est généré automatiquement.